Centre pour la Démocratie, le Développement et la Culture en Afrique
La démocratie ivoirienne traine le passif du long règne de Félix Houphouët-Boigny au pouvoir qui est demeuré plus de quarante ans à la tête de l’Etat, l’intermède catastrophique de son « héritier » Henri Konan Bédié amena pour la première fois des militaires au pouvoir en 1999. Ayant connu une longue période de stabilité politique et économique durant les années Houphouët-Boigny (1960-1993) avec un parti unique suivi d’une ouverture au multipartisme contrôlé à partir des années 1990, les héritiers de Houphouët-Boigny ont mal géré les passations du pouvoir entre eux mettant le pays et sa démocratie dans une pente si raide qu’elle finira par se casser et diviser le pays en plusieurs clans politiques et sociaux. La démocratie a été mise entre parenthèse au profit d’intérêts claniques et ethniques. Les trois élections présidentielles (1995, 2000, 2010) organisées, après le décès du « vieux » ont plutôt ouvert des chapitres de violences et de contestations qui trouvent ses racines dans les lois nationales notamment la Constitution. Une étude récente de Osiwa énumère quelques raisons de l’échec de la démocratie ivoirienne.
• Pour les grandes catégories de conflits internes identifiés, les instruments juridiques nationaux et internationaux, qui sont nombreux et variés, se révèlent souvent inopérants dans la recherche de solutions appropriées du fait des intérêts égoïstes et des enjeux régionaux.
• L’examen des modalités de fonctionnement du système politique montre qu’il existe un véritable fossé entre les normes de référence et les pratiques institutionnelles.
• Les principaux droits économiques, sociaux et culturels ainsi que les droits civils et politiques sont affirmés par les textes. Mais des dispositions et mécanismes juridiques mis en place pour promouvoir et protéger sont inefficaces.
• La Constitution ivoirienne du 1er août 2000 consacre la séparation des pouvoirs, mais la pratique constitutionnelle révèle que de nombreuses dispositions constitutionnelles limitent la portée de ce principe clé de la bonne gouvernance.
• Le cadre normatif de la fonction publique a subi de profondes mutations avec la crise militaro-politique. L’affaiblissement des performances actuelles de l’État trouve en partie sa source dans l’absence des services publics administratifs dans certaines parties du territoire (centre, nord, ouest) en raison du reflux massif des fonctionnaires déplacés par le conflit armé. Par ailleurs, la situation de crise a remis en cause les modalités d’organisation de la transparence en matière de recrutement, de formation et de promotion des fonctionnaires.
Extrait de l’ouvrage « Les défis de la gouvernance en Afrique de l’Ouest », Gorée Institute, Edition 2013